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Et si les marques se trompaient de combat sur la data en négligeant leur patrimoine ?

 

En misant essentiellement sur la collecte de data consommateurs, ne seraient-elles pas en retard sur la structuration d’autres data avec un potentiel bien plus important ; celles du patrimoine data de l’entreprise, de ses activités et de ses produits.

Avec l'émergence de nouveaux paradigmes de recherche chez les utilisateurs, le futur des requêtes web reposera probablement sur des robots intelligents (IA deep learning) qui se nourrissent des données disponibles sur le web, Chat GPT en est un premier exemple, mais les labs regorgent de projets de ce type. Les organisations doivent nourrir ces moteurs pour répondre aux évolutions des usages et des audiences. Demain, encyclopédies, newsletters personnalisées et autres assistants de type personal shoppers vont fleurir grâce à l’IA et ils ont besoin de vos données, révélés votre patrimoine d'entreprise grace à la data.

 

UX Data des marques

 

 

Le mythe de la data conso

Depuis quelques années : les marques se sont lancées dans une quête de données personnelles, et misent sur l’IA pour les exploiter. Les applications semblent évidentes pour consolider la connaissance client, identifier des tendances permettant d’adapter l’offre, et enfin générer du trafic vers les points de contact pertinents pour offrir une expérience personnalisé. Le Graal du marketing des années 2000.

 

Encore faut-il les exploiter... Les investissements dans la data vont-ils permettre aux marques de les exploiter, ces fameuses datas ? Probablement ! Mais quand ? Et pour faire quoi ? L’analyse de la data est le plus gros marché de la data marketing  (selon une étude de BVA Limelight ), ce qui démontre bien la difficulté à traiter ces océans de data, au-delà de la publicité ciblée. Le big data va exploser... mais l'exploitation temps réel n'a augmenté que de 20% en 10 ans.

 

Big data evolution

 

 

Un vaste gâchis en perspective 

La collecte de data conso ; voilà une approche qui semble discutable face aux “guerres” qui émergent concernant la donnée perso, et qui risquent de profiter aux carrefours d’audience des Gafas qui seront les seuls en mesure d’offrir des possibilités pertinentes aux annonceurs. Mais qu’en est-il des bénéfices utilisateurs ? On l’a vu ; Apple, Facebook et Google se sont vigoureusement exprimés sur le sujet à coup de communiqués ces dernières années. Seules des marques très digitales et très inspirationelles avec un écosystème de service (comme Nike) pourront exploiter durablement ces données dans des parcours end2end.

Bien que le marché de la publicité ciblée soit toujours en croissance en 2022, malgré le RGPD, l’évolution de la réglementation sur la protection des données personnelles va remettre en cause l’efficacité de ces approches et les utilisateurs en sont conscients. Seuls (à nouveau) les Gafas en tireront parti, grâce à leurs systèmes d’identification bien en place qui vont à nouveau renforcer leurs régies et mieux protéger leurs utilisateurs contre des publicités non pertinentes pour ces derniers. #RIP les cookies. Ce qui se comprend tout à fait ; en 2019, déjà 54% des répondants d’une étude IAB déclaraient que l'encombrement des annonces est le principal obstacle à une bonne expérience utilisateur. La même année, 75% des Américains utilisaient des Adblockers, dont 10% de manière active. Actuellement en Chine, ils seraient 150 millions, en France cela représenterait 60% des internautes.

 

 

 

Avez-vous souvent vu des pubs Amazon ?

Les marques vont être amenées à revoir leur stratégie de relation client. À trop miser sur l’acquisition, on en oublie que le bouche-à-oreille reste l'outil d’acquisition le plus puissant… mais pour cela, il faut une expérience distinctive, une valeur d’usage.

 

La fidélisation est souvent le parent pauvre des stratégies basées sur l’activation de trafic et qui peuvent ruiner votre ROI (selon la loi de Pareto, seulement 20% des clients généreraient 80% de la marge). En effet, malgré les promesses des régies publicitaires, le ROI réel des campagnes apparaît encore très complexe à calculer, comme l’illustre “Subprime Attention Crisis” le livre sans langue de bois de l'Américain Tim Hwang qui aborde le sujet…

 

Subprime Attention Crisis de Tim Hwang

Subprime Attention Crisis de Tim Hwang

 

 

Ces stratégies sont souvent construites sur la collecte de données afin de définir des scores d’affinité, basés sur une analyse d’audience, un historique de surf ; voir d’achat. Mais nous sommes loin d’une exploitation en temps réel qui mixeraient données tiers et données propriétaires. Finalement, peu d’insights sont exploitables, faute à une faible prise en compte du contexte dans la récolte et donc une faible compréhension des motivations des consos… qui évoluent rapidement.

 

 

N’allons-nous pas engager des fortunes pour cibler des profils et des comportements obsolètes ?

 

Mais quelles sont ces nouvelles attentes ? C’est là que le design intervient dans sa dimension ethnographique de l’analyse des comportements. Il permet de les traduire en solution pour les utilisateurs, consommateurs et autres usagers, qui, comme nous l’avons vu dans un précédent article, sont de plus en plus amenés à manipuler des informations pour s’orienter dans les offres du marché où se multiplient les labels, certifications, indices et autres normes censées les aider. L’UX research permet de comprendre ce qui est important à leurs yeux, à quel moment et sous quelle forme leur donner ces informations… en savoir plus sur la recherche utilisateur

 

Les consommateurs, toujours plus informés, vigilants et exigeants, imposent de nouveaux besoins en information. Notamment un besoin de transparence, la confiance des Français dans le numérique ne progresse pas, voire baisse sur certains segments de la population (Baromètre ACSEL 2023).

Les mécanismes d’arbitrage des consommateurs en deviennent plus complexes. D’une part une offre gigantesque, de l’autre des critères de choix plus nombreux, voire complexes, et un temps (de cerveau) disponible plus restreint. Bref, un effort cognitif de plus en plus important, qui laisse place à l'émergence de curateurs et d’outils d’arbitrages, nouveaux outils, assistants du quotidien qui nous amènent à déléguer de plus en plus nos choix à des machines ou des marques. Par exemple, le site wedressfair propose une analyse des marques de prêt à porter sous l’angle éco-socio responsables.

 

 

 

Faciliter le commerce traditionnel en ligne 

Prenons l’exemple de Darty qui édite “un score de durabilité”, une donnée inédite et unique en Europe dixit Darty sur son site. “La sélection durable” s'appuie sur 2 types de données : la réparabilité et la fiabilité. Nombre de marques ne communiquant pas sur ces sujets, elles sont exclues de fait de ce palmarès. Mais cela se transforme en tendance de fond, la loi qui favorise un indice de réparabilité votée le 10 février 2020 l’illustre. Il va donc falloir s’y conformer et cela va certainement inspirer des start-ups (et peut-être de nouveaux business model pour ces titres de presse ?). Jusqu'à présent, ce type de palmarès était édité par des organismes ou des médias prescripteurs comme Marianne ou 30 millions de consommateurs. Un travail d’investigation et de traitement de données manuelles… Vous voyez où je veux en venir ? Ces données constituent un patrimoine difficilement accessible.

data neuronnes-et-codes-ean

 

Darty serait ravi de pouvoir s’appuyer sur des données issues des marques elles-mêmes, et en accès libre #open. Idem pour les allergènes et autres critères alimentaires, que les grands distributeurs ne peuvent pas proposer dans leurs filtres, car cela demanderait un travail important (manuel) et engagerait leur responsabilité.

 

Mais Yuka s’en occupe...

 

Les consommateurs, très informés (ce n’est pas un scoop), et avec un système de valeurs de plus en plus variable, vont s’intéresser pour certains à la performance du produit, pour d'autres à l'esthétisme, ou encore au bon rapport qualité/prix, d'autres à l'origine des produits etc… Bref, autant de critères de recherche que les sites de vente en ligne ont du mal à prendre en compte pour orienter l’utilisateur dans sa quête, afin de filtrer l’offre selon ses propres critères. 

 

Avec un patrimoine disponible en API ouvertes, contenant les données du fabricant, facilement, la tâche des revendeurs consistant à mieux vendre ces produits serait facilitée. Cela donnerait plus de visibilité à ces produits dans les points de vente “traditionnels” en ligne, imaginez le potentiel pour des marketplace spécialisées, sur Google Shopping ou sur Amazon avec Chat GPT 4.

 

Femme aeroport

 

 

 

Le consommateur averti veut gagner du temps, vive la curation !

Voilà tout l'enjeu des comparateurs qui ont disrupté le monde du voyage au début du web. S'appuyant sur une donnée structurée à destination des tour-opérators, ces comparateurs ont créé de nouveaux business models d’intermédiation permettant aux consommateurs de comparer rapidement les offres… et d’y accéder... affiliation quand tu nous tiens…  

 

 

 

Une illustration intéressante avec le comparateur de mobilité OUi.sncf

Comparateur de mobilité OUi.sncf

Depuis 2021, ce comparateur offre aux voyageurs la possibilité d’étudier 5 moyens de transport différents sur un trajet défini et selon 3 critères de comparaison :

  • Le critère environnemental avec la quantité de CO2e émise lors du trajet, 

  • Le critère du temps de trajet avec le temps moyen que le voyageur passe à bord du mode de transport pour aller d’un point A à un point B, 

  • Le critère du temps utile, qui correspond au temps moyen dont dispose pleinement le voyageur à bord de son mode de transport pour vaquer à ses occupations (lire, travailler, regarder un film, etc.). 


Voilà un bon exemple qui s’appuie sur des data pour aider l’utilisateur à choisir selon des critères d’usage. Le challenge était de trouver les indicateurs utiles pour ces utilisateurs vis-à-vis de leurs systèmes de valeurs et de leurs contraintes (temporelles et économiques).

 

 

 

Des outils souvent en dehors des parcours clients

D’autres marques se sont essayées à produire ce type d’outils, le problème est que ces outils se trouvent rarement sur le parcours des consommateurs qui évoluent dans un monde multimarques, multi enseignes. Par besoin de simplicité (encore), il a besoin d’avoir une vision du marché et non d’aller interroger chaque marque (chaque compagnie aérienne). Google, et maintenant Chat GPT son challenger, ainsi que les comparateurs, vont jouer ce rôle.

 

De nos jours, le bon marketeur sait bien qu’il est vain de tenter d’attirer le consommateur dans ses filets sans se positionner sur son parcours. Nous savons également que les avis de tiers constituent une source d’influence importante pour les consommateurs. À nouveau, c’est le pouvoir du bouche-à-oreille qui sert de nombreux biais bien connus : notamment celui de la confirmation d’une information déjà identifiée et pesant lourd dans le système de valeurs pour la prise de décision. Les curateurs vont simplifier tout ça , des ia spécialisées vont arriver plus vite qu'on ne le croit ! 

 

Assiette

 

 

Vers de nouveaux carrefours d’audience basés sur la curation de data 

Nous assistons actuellement à une émergence de la data curation (des algorithmes influenceurs), véritables assistants de choix au service des humains… et les start-up vont fleurir dans ce secteur comme l’a prédit l’un des fondateurs de Chat GPT début 2023.

 

Voilà les nouveaux carrefours d’audience, ils n’attendent que vous et vont dans le sens de la consumer centricity. Ils vous imposent de raconter votre marque et vos produits d’une nouvelle manière, grâce VOS data.

À l'instar de Yuka, des projets comme MyLabel, Scan-up, SIga pour les produit transformés ou encore Quel produit ? de l’UFC-Que Choisir, émergent et sont en phase de devenir de nouveaux carrefours d’audience avec une proposition simple pour les utilisateurs : nous manipulons ces données complexes à votre place.

 

 

 

Bientôt, ils deviendront des points de vente, et il va falloir les alimenter. 

Structurez vos contenus, marque et produits dans des API afin de permettre à ces curateurs de s’y greffer et de vous présenter selon leurs propres filtres d’analyse est le principal défi à venir pour les marques dans le but de se positionner rapidement sur ces points de contact.

 

Par exemple, s'il y avait un Yuka du prêt-à-porter, (il y en un Clear-fashion) il propulserait probablement Veja ou Twothirds car ces marques offrent suffisamment de preuves de la durabilité de leurs produits et de leurs engagements pour construire un monde plus responsable. 

Yuka carotte

 


S’il y avait un
Yuka du luxe, pourrait -il révéler la singularité et l’engagement de marques comme Hermès et analyser chacun de ses produits ? Cette marque a pourtant un comportement responsable et durable depuis toujours, Hermès, c'est le temps long qui préserve les savoirs-faire…

Mais dispose-t-elle de la donnée pour permettre à ces outils de l’évaluer et donc de révéler cette singularité ? Pas certain, pourtant cette marque (comme les autres) sera amenée à fournir la preuve de ses engagements par la data.


S'il y avait un Yuka du recrutement, de quelles données aurait-il besoin pour aller au-delà du label “best place to work”... Glassdoor pourrait bien devenir ce Yuka du recrutement… en s’appuyant également (par exemple) sur les données de Moral Score qui note non pas les produits, mais les entreprises sur une analyse qualitative des données de ces entreprises, demain, ce sera automatisé.

 

Ces agrégateurs, curateurs et autres assistants n’ont pas besoin des données personnelles mais bien des données de l’entreprise, et de ses produits. Laissez -les mettre en avant vos atouts. Mais encore faut-il qu’ils soient en adéquation avec les centres d'intérêt des consommateurs. Retour au point de départ de la compréhension des attentes consommateurs.

 

Un autre type de curateurs l’a bien compris pour les marchés financiers : les agences de notation comme BlackRocks somment les entreprises (depuis plusieurs années) d’être plus transparentes sur leurs données RSE...

 

 

 

Vers une attraction naturelle et durable qui demande de la data dès maintenant

À l’image du SEO, les marques qui ont construit des stratégies durables de référencement naturel se rendant extrêmement visibles dans les parcours consommateurs… à moindre frais. Elle bénéficie d’un historique et d’une popularité dans les algorithmes.  Cette data “patrimoine de marque” offre la même possibilité sur Chat GPT qui a attiré 1 million d'utilisateurs en 5 jours, un record !

1Muser-5days-chatgpt2023

 

Ces nouveaux acteurs de la curation constituent une opportunité pour les marques d’émerger naturellement, mais pour cela, elles devront fournir les preuves en chiffres, et en flux de données afin d’être considérées par ces nouvelles plateformes.

 

 

 

Conclusion

Bref, si vos produits sont uniques, si vos matières premières sont de qualité, si vos procédés de production sont exceptionnels tout comme vos actions sociales et environnementales : donnez-les comme de la chair fraîche à ces robots qui crawlent le web. Ces données seront prêtes à être transformées en histoires, celles dont ont besoin ces nouveaux influenceurs qui racontent vos produits : les robots.

Data-bot-ia-chatgpt

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À propos de l’auteur

Christophe COTIN VALOIS

Christophe COTIN VALOIS

UX Strategist & Researcher, Christophe est un expert en méthodologies test’n learn centrées sur l’utilisateur. Il intervient régulièrement entant que speaker, mentor ou rédacteur sur ses sujets de prédilection.

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